COMMUNIQUÉ DE PRESSE : La CCDH à Cannes pour dénoncer les dérives de la psychiatrie coercitive
La Commission des Citoyens pour les Droits de l’Homme (CCDH) se rendra à Cannes les mercredi 10 et jeudi 11 décembre 2025 pour une série d’actions visant à dénoncer les dérives de la psychiatrie actuelle, en particulier la promotion et la banalisation de pratiques coercitives : contention, isolement, enfermement et internement abusif.
Actions prévues à Cannes :
– Mercredi 10 décembre 2025 – de 17h30 à 19h
Rassemblement de la CCDH devant les portes du Congrès français de psychiatrie à Cannes.
Objectif : dénoncer, à l’occasion de ce grand rendez-vous professionnel, la place toujours centrale accordée aux mesures coercitives (isolement, contention, enfermement) au détriment du respect de la dignité humaine, du consentement et des approches alternatives non violentes.
– Jeudi 11 décembre 2025 – de 10h à 10h45
Manifestation devant l’entrée du Centre Hospitalier Simone Veil de Cannes.
Objectif : dénoncer les pratiques attentatoires à la dignité humaine et aux droits fondamentaux que constituent les mesures d’isolement et de contention pratiquées dans cet établissement, notamment sur des patients mineurs et des patients en soins libres, en contradiction avec le cadre légal.
Ces actions à Cannes font écho aux constats nationaux récents du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), qui a alerté sur l’ampleur et la gravité des pratiques d’isolement et de contention en psychiatrie, en particulier lorsqu’elles visent des mineurs et des patients officiellement en soins libres.
Un contexte national explosif : l’avis urgent du CGLPL publié au Journal officiel
Le 4 décembre 2025, le Journal officiel a publié l’avis du 6 octobre 2025 relatif aux enfants privés de liberté dans les établissements de santé mentale, dans lequel le CGLPL dénonce :
- un recours massif à l’isolement de mineurs hospitalisés en psychiatrie, y compris en « soins libres », alors que ces mesures sont en principe réservées aux soins sans consentement ;
- des privations de liberté illégales (isolement, enfermement, contention) échappant au contrôle du juge, en totale contradiction avec le Code de la santé publique, la Convention internationale des droits de l’enfant et les obligations constitutionnelles de la France ;
- une situation paradoxale dans laquelle les enfants, pourtant les plus vulnérables, sont ceux que la loi protège le moins.
Le CGLPL appelle solennellement à la création d’un statut spécifique du mineur hospitalisé en psychiatrie, à l’interdiction de l’isolement et de la contention des mineurs, mettant ainsi les pouvoirs publics face à une obligation de réforme urgente.
Cannes : un cas emblématique des dérives dénoncées au niveau national
Les données analysées par la CCDH pour le Centre Hospitalier Simone Veil de Cannes (rapports annuels d’isolement et de contention 2022–2024, constats du CGLPL suite à sa visite de mai 2023) montrent que les dérives signalées au niveau national se retrouvent localement à un niveau particulièrement préoccupant.
Des mineurs enfermés, isolés et parfois attachés :
- 2022 : 2 mineurs isolés pour un total de 35h20 ;
- 2023 : 3 mineurs isolés pour 471h38 cumulées, dont l’un contentionné 120h39 ;
- 2024 : 3 mineurs isolés pour 195h cumulées, dont l’un contentionné 17h40.
Le CGLPL relève que des mineurs, parfois même en soins libres, peuvent être isolés ou attachés en toute illégalité et sans aucun contrôle extérieur, situation parfaitement en phase avec les abus dénoncés dans son avis national sur les enfants privés de liberté en psychiatrie.
Des conditions indignes et attentatoires à la dignité humaine :
- chambres d’isolement sans dispositif d’appel, parfois sans accès direct à l’eau, avec des sanitaires visibles depuis le fenestron, sans respect de l’intimité ;
- port du pyjama systématique à l’entrée en chambre d’isolement ;
- utilisation de chambres dites « hôtelières » en réalité indignes, équipées de caméras de vidéosurveillance, alors que le CGLPL rappelle qu’en aucun cas des caméras ne peuvent équiper des chambres d’hospitalisation.
Une inflation des durées d’isolement et des chiffres opaques :
Les rapports annuels montrent une progression alarmante de la durée cumulée des isolements, atteignant environ 400 jours en 2024, avec des durées pouvant aller jusqu’à 38 jours pour un même patient. La contention mécanique, en recul en 2023, repart à la hausse en 2024.
Parallèlement, les registres fournis par l’hôpital sont incomplets et dépourvus de nombreuses mentions obligatoires, ce qui rend tout contrôle extérieur illusoire. Le CGLPL lui-même a dénoncé l’absence d’outil fiable de traçabilité, parlant de mesures « non exhaustivement tracées » et d’un « risque avéré d’erreurs ».
Des violations flagrantes du cadre légal
L’article L.3222-5-1 du Code de la santé publique prévoit notamment que :
- l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours, strictement encadrées et limitées dans le temps ;
- ces mesures sont réservées aux patients en hospitalisation complète sous contrainte (soins sans consentement) et contrôlées par le juge au-delà d’une certaine durée ;
- chaque établissement doit tenir un registre et un rapport annuel complets permettant un contrôle effectif.
Or, au Centre Hospitalier Simone Veil de Cannes, la CCDH constate :
- l’application d’isolements et de contentions à des mineurs et à des patients en soins libres, en violation du cadre légal ;
- des durées pouvant dépasser très largement les plafonds prévus ;
- des registres incomplets, empêchant tout contrôle effectif des autorités de tutelle et du juge.
Ces dérives locales s’inscrivent exactement dans le scandale national mis au jour par l’avis du CGLPL publié au Journal officiel : des enfants et des patients en soins libres sont privés de liberté, parfois attachés, sans base légale claire ni contrôle juridictionnel effectif.
Les exigences de la CCDH
Face à la situation à Cannes, qui illustre de manière concrète les abus dénoncés au niveau national, la CCDH exige :
- La mise en conformité immédiate des pratiques d’isolement et de contention avec la loi et les recommandations nationales ;
- La tenue d’un registre complet et fiable d’isolement et de contention, conforme au Code de la santé publique ;
- L’arrêt total des mesures d’isolement et de contention appliquées aux mineurs en soins libres et aux patients mineurs hospitalisés en unité pour adultes ;
- La garantie que plus aucun patient en soins libres ne puisse être isolé ou attaché sans qu’une procédure légale et un contrôle juridictionnel effectif ne soient mis en œuvre.
La CCDH appelle également les autorités sanitaires et judiciaires à tirer toutes les conséquences de l’avis du CGLPL du 6 octobre 2025 et à engager, au-delà du seul cas de Cannes, une réforme structurelle pour faire cesser ces pratiques sur l’ensemble du territoire.
Une mobilisation pour défendre les droits humains fondamentaux
Par sa présence à Cannes les 10 et 11 décembre, la CCDH entend :
- rappeler que l’enfermement arbitraire n’a pas sa place dans un hôpital ;
- affirmer que la dignité humaine n’est pas négociable, quel que soit le diagnostic psychiatrique ;
- rappeler que la loi s’applique à tous, y compris aux établissements psychiatriques et aux congrès où se réfléchissent et se promeuvent les pratiques du secteur.
La CCDH invite les médias, les élus locaux, les associations, les familles et l’ensemble des citoyens à se saisir de ce scandale et à demander des comptes sur les pratiques d’isolement et de contention des patients, en particulier des enfants, à Cannes et partout en France.
Contact presse
Commission des Citoyens pour les Droits de l’Homme (CCDH-France)
Porte-parole : Mylène Escudier, présidente
E-mail : info@ccdh.fr
Site : www.ccdh.fr
TEL : 09.81.00.22.92
