« Faites-lui une injection ! »
Cette phrase de sa psychiatre aux infirmiers, combien de fois l’a-t-elle entendue ?
Maltraitée par sa mère avant d’être maltraitée en psychiatrie, Christelle Rosar a eu le courage de mettre par écrit son parcours et son expérience dans un livre intitulé « J’ai survécu à la psychiatrie » paru aux éditions Max Milo.
Protester avec force contre la décision d’un psychiatre de vous interner, se rebeller contre un système dans lequel, paradoxalement, votre parole et vos sentiments ne valent rien ou pas grand-chose, refuser un traitement qu’on vous impose sans explication ni information, résister physiquement à ceux qui tentent de vous maîtriser, la fuite, la défense ou l’attaque, toutes ces réactions naturelles, parfois violentes, face à l’arbitraire deviennent des symptômes supplémentaires de votre « maladie ». Ces soi-disant symptômes viennent justifier a posteriori le « traitement » et donner raison au médecin tout en vous donnant tort.
« Vous êtes malade ». « Vous n’allez pas bien ». « Vous êtes agitée ». « Vous voyez bien que vous êtes énervée. J’appelle l’ambulance ». « Vous n’êtes pas capable de … ». « Vous n’êtes pas assez solide ». « Vous croyez aller bien ». « Ne faites pas d’histoires et votre internement se passera bien ». « Je vous hospitalise, un point c’est tout ». « Mettez-la sur le lit et piquez-la ». « Calmez-vous, l’injection va agir ». « Maintenez-la le temps que l’injection fasse effet ».
L’engrenage ! Pendant 20 ans ! Avec de multiples allers-retours entre l’hôpital et le « milieu ordinaire ».
Alors, vaut-il mieux accepter sans broncher ? Simuler la résignation et attendre ? Et ainsi, peut-être avoir une chance, un jour, d’être libérée ?
Avec lucidité et émotion, l’auteure décrit un système psychiatrique qui, une fois qu’il vous a diagnostiqué, étiqueté et catalogué, vous broie et ne vous lâche plus.
Elle nous décrit l’internement sous contrainte, l’isolement, la contention, les injections de force de calmants puissants et abrutissants, les humiliations et dévalorisations émanant de sa psychiatre Mme Claire, la personne même qui est censée l’aider : « J’avais le sentiment qu’elle cherchait à me diminuer et à me dévaloriser, alors que j’avais besoin d’être soutenue ».
Elle évoque aussi la complicité et l’amitié avec d’autres patients, l’attitude plus conciliante et plus humaine mais relativement impuissante de M. Rachid, un autre psychiatre, et surtout le bout du tunnel ! La fin du cauchemar, grâce bien sûr à sa volonté de s’en sortir et grâce à sa rencontre avec Martine, Jeanine et Marie-Claude, membres de l’association Advocacy.
A lire absolument ! « J’ai survécu à la psychiatrie » par Christelle Rosar. Edition Max Milo