Manifestations contre les abus psychiatriques devant trois hôpitaux d’Île-de-France
C’est ainsi qu’une quinzaine de bénévoles étaient présents devant les portes des :
- Centre Hospitalier Paul Guiraud à Villejuif entre 9h30 et 10h15 ;
- Centre Hospitalier Sud francilien à Corbeil-Essonnes entre 11h15 et 12h ;
- Centre Hospitalier de Meaux entre 15h et 15h45.
En avril 2017, le journal Le Parisien relatait le vécu d’une ancienne patiente qui avait été internée sous contrainte au sein du Centre Hospitalier Paul Guiraud à Villejuif. Étant anorexique, la jeune femme de 36 ans ne voulait apparemment pas guérir et son médecin lui aurait dit d’un ton froid : « Pyjama et chambre d’observation ». Elle s’est alors retrouvée en chambre d’isolement. Elle y restera un an et sortit peu. « J’étais devenue un animal qu’on gave », aurait-elle déclaré. La patiente aurait également témoigné que cinq infirmiers l’auraient attachée au lit avec des sangles.
Par ailleurs, le rapport d’activité 2017 de la Commission départementale des soins psychiatriques du Val-de-Marne indique que dans l’Unité Hospitalière Spécialement Aménagée de Paul Guiraud, la tenue du registre de l’isolement et de la contention ne respecte pas les prescriptions de l’article L. 3222-5-1, car il n’y figure pas les heures de début et de fin, la fréquence des contrôles, les noms et les qualités des personnes ayant effectuées les contrôles.
Ainsi, les préconisations suivantes ont été faites :
- « La tenue du registre des chambres d’isolement ne permet pas, en l’état, de s’assurer que l’isolement et la contention ont été prescrits en dernier recours. Les dispositions de l’article L. 3222-5-1 devront s’appliquer : pour chaque mesure d’isolement ou de contention, ce registre mentionne le nom du psychiatre ayant décidé de cette mesure, sa date et son heure, sa durée et le nom des professionnels de santé l’ayant surveillé. Ce registre devra être ténu de façon exhaustive. »
Concernant le Centre Hospitalier Sud francilien à Corbeil-Essonnes, une enquête avait été ouverte en été 2017 puis classée après le décès d’une patiente retrouvée morte sur son lit, le pantalon baissé et des traces sur les cuisses. Elle se serait suicidée. La responsabilité de l’établissement sur ce suicide n’a visiblement pas été considérée.
Au Centre Hospitalier de Meaux un ancien député de Seine-et-Marne avait effectué une visite de l’établissement psychiatrique en mai 2017 et un constat alarmant avait été fait :
- Tous les patients vus, hospitalisés dans l’unité fermée sont en pyjama.
- Le registre de contention ne respecte pas la circulaire du Ministère de la Santé relative à l’isolement et la contention, ni la loi. En effet, il contient les noms et prénoms des patients ayant fait l’objet d’une mesure de contrainte, alors que cela doit être anonymisé. La durée de la mesure de contrainte n’est pas précisée, cette information étant pourtant très importante.
- Selon le registre de la loi, l’ensemble des autorités de contrôle (à savoir le procureur, Président du Tribunal de Grande Instance, Préfet et Maire) n’ont pas visité l’établissement en 2016, comme demandé par la loi. Or, chaque autorité doit contrôler au moins une fois par an le service de soins sans consentement (article L.3222-4 du Code de santé publique).
- Selon le chef de Pôle, le Docteur Mahe, plus de la moitié des personnes internées sont libérées le 8ème jour pour ensuite être re-hospitalisées. Cela signifie donc que ces citoyens ne sont jamais auditionnés par le Juge des libertés et de la Détention (JLD), ni ne rencontrent leur avocat. Selon la loi, le dossier du patient doit être adressé au JLD dans un délai de 8 jours à compter de l’admission pour une audience qui doit avoir lieu le 12ème jour.
- Tous les patients vus en service fermé étaient fortement sédatés.
- La chambre d’isolement est insalubre. Aucun sanitaire dans la chambre d’isolement.
Par ailleurs, les trois départements concernés par les manifestations de la CCDH ce samedi 29 septembre font l’objet de nombreux soins sous contrainte à la demande d’un tiers en urgence ainsi qu’en cas de péril imminent. Ces deux types de mesures d’hospitalisation sans consentement devraient, comme le prévoit la loi, être utilisées à titre exceptionnel étant donné le peu de garantie qu’elles représentent pour les patients.
Or, dans le département de la Seine-et-Marne, les statistiques communiquées par la Commission départementale des soins psychiatriques indiquent que sur 855 internements sous contrainte à la demande d’un directeur d’établissement en 2016, 678 ont été réalisées en cas d’urgence et 110 en cas de péril imminent. Ces deux mesures représentent ainsi 92% de la totalité des soins sans consentement décidés par un directeur d’établissement dans ce département.
Dans les départements de l’Essonne et du Val-de-Marne, les dernières statistiques communiquées (2016 pour l’Essonne et 2017 pour le Val-de-Marne) rapportent un pourcentage de 62% d’utilisation de ces mesures.
La CCDH s’inquiète de constater un tel manquement et non-respect de la loi relative aux soins sous contrainte et alerte les autorités départementales habilitées à contrôler les hôpitaux psychiatriques : Présidents de TGI, Procureurs, Préfets, Maires, députés et sénateurs, délégués départementaux de l’ARS, Commissions départementales des soins psychiatriques et enfin la Contrôleure Générale des lieux de privation de liberté.
La CCDH est une association spécialisée dans la protection des droits de l’Homme dans le domaine de la santé mentale. Elle reçoit chaque semaine des dizaines de témoignages de famille et de victimes abusées. Depuis plus de 40 ans, elle dénonce les pratiques inhumaines et dégradantes de la psychiatrie et œuvre pour le respect des droits et de la dignité des patients.
Pour toute information, contactez la Présidente de la Commission des Citoyens pour les Droits de l’Homme au 01.40.01.09.70 ou par e-mail : info@ccdh.fr
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