Psychiatrie : l’impossible réforme ?
Une psychiatrie plus respectueuse de ses patients ?
Moins de coercition, moins de brutalité ?
Une abolition, ou du moins une réduction drastique, de la contention, de l’isolement, de la camisole chimique est-elle possible ?
Les appels d’une partie réformatrice des professionnels de la psychiatrie, de patients et de leur famille et d’associations ont beau se multiplier *, rien ne semble y faire : aucune véritable réforme dans ce sens ne semble devoir se faire dans un avenir prévisible.
Ces appels se heurtent à d’autres logiques et d’autres intérêts :
Une logique sécuritaire réactivée à l’occasion de chaque nouveau fait divers sous la pression d’une partie de l’opinion publique et des médias.
Une logique financière ou budgétaire, associée à une logique de gestion strictement administrative (voir notre brochure « Psychiatrie, enjeu sanitaire et financier » sur ce même site).
Une logique « médicale », pas forcément étrangère à la logique financière d’intérêts privés, qui pousse à toujours plus de prescriptions et de consommations irraisonnées et souvent forcées, de psychotropes.
La machine psychiatrique, telle qu’elle existe actuellement, génère et amplifie sa propre violence. Elle engendre la peur et les rancœurs de ceux qui s’y sentent incompris, négligés, broyés. Elle entretient les doutes éthiques des personnels de santé concernant des « soins » qui se résument trop souvent au recours inutile et abusif à la force et à la contrainte et/ou au gavage de psychotropes puissants et abrutissants.
Comment sortir de cet engrenage ?
- Il faudra avant toute chose du courage et de la détermination au nouveau ministre de la Santé et au pouvoir politique en place pour aborder frontalement ces problèmes.
- Cela commence par une estimation correcte, sans concession ni déni, de la situation catastrophique des droits de l’homme en psychiatrie, de sa gravité et de son ampleur.
- Il faudra concentrer ses efforts et tous les moyens disponibles sur des mesures concrètes, pas nécessairement spectaculaires, permettant de mettre fin aux pratiques psychiatriques contraires aux droits de l’homme et les remplacer par des pratiques basées sur la bienveillance, l’écoute et la communication.
Nous espérons que le ministre entendra notre appel ainsi que celui de toutes les associations de défense des patients réellement réformatrices pour mener à bien une vraie réforme. Au bout du compte, ce sont les patients qui y gagneront et la société tout entière.
La CCDH entend jouer pleinement son rôle de lanceur d’alerte en documentant les abus les plus graves et les atteintes aux droits de l’homme dans le domaine de la santé mentale, en assistant les patients victimes de ces pratiques, et en agissant en faveur d’une approche humaine des troubles mentaux.
* voir notamment l’article publié dans Le Parisien du 21 juillet 2023 : « Le naufrage de la psychiatrie en lumière »