Existe-t-il des alternatives respectueuses des droits de l’homme dans le domaine de la santé mentale ?
OUI
L’approche Open Dialogue
Le « Dialogue ouvert » est une approche innovante des crises psychiatriques aiguës développée en Finlande.
Les principes et les valeurs de l’Open Dialogue sont simples. Les personnes en situation de crise sont rencontrées dans les 24 heures puis quotidiennement jusqu’à ce que la crise soit résolue. L’hospitalisation est évitée, ainsi que la stigmatisation qui en découle, et les rencontres ont lieu au domicile des personnes qui font appel aux services de l’équipe. Le recours aux médicaments antipsychotiques est évité dans la mesure du possible. La famille et les proches de la personne font partie intégrante de l’Open Dialogue. En outre, les personnes se voient proposer d’autres thérapies en fonction de leurs besoins, par exemple une aide à l’emploi, une thérapie individuelle, une ergothérapie, etc.
L’objectif des réunions est de développer un dialogue, de donner la parole à toutes les personnes concernées et de placer la personne au centre.
Les résultats des études sont les suivants (suivi sur 5 ans Seikkula et al. 2006) :
- La durée de la psychose non traitée (DUP) est tombée à trois semaines,
- 2/3 des patients n’ont pas eu recours aux médicaments antipsychotiques,
- 83 % ont retrouvé un emploi complet,
- Peu de nouveaux patients atteints de schizophrénie : l’incidence annuelle est passée de 33 (1985) à 2-3 /100 000 (2005).
Les Maisons Soteria
« Maison Soteria », Soteria house en anglais, est un modèle de communauté proposant un espace pour des personnes traversant des crises émotionnelles extrêmes.
Basé sur le modèle du rétablissement, les maisons Soteria ont comme principes :
- le respect des décisions et de l’indépendance des usagers,
- le lien social et les responsabilités communes,
- la recherche de sens aux expériences psychotiques,
- l’usage nul ou minime de neuroleptiques,
- l’interdiction de toute obligation, de toute coercition même psychologique pour obtenir « l’adhésion ».
L’objectif du programme d’hébergement Soteria est de créer un foyer temporaire où les personnes en proie à des états extrêmes peuvent vivre sans être dérangées, avec la possibilité de traverser leur crise sans médicaments.
A l’heure actuelle, il existe plusieurs centres Soteria :
En Hongrie : https://soteria.hu/
A Berne, en Suisse : https://www.igsbern.ch/soteria-3.html
Un projet d’ouverture d’un centre Soteria est en cours en Angleterre : https://www.soterianetwork.org.uk/#
Le programme « QualityRights » de l’OMS :
Le 28 juin 2012, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a lancé le projet Quality-Rights, listant les droits de l’homme qui doivent être respectés dans toutes les installations de soins de santé mentale et sociale.
Ce programme d’évaluation de la qualité et du respect des droits dans les établissements de santé mentale, basé sur la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’Homme, permet de développer une initiative ciblée et adaptée à l’échelle souhaitée (service, établissement, groupe hospitalier…). Il propose des outils permettant de procéder à une observation-diagnostic in situ et d’élaborer un plan de formation ciblé à l’attention des usagers, des aidants/familles et/ou des professionnels.
L’exemple de l’Italie
En Italie, la « loi 180 » est une loi qui a précipité la désinstitutionalisation italienne. En étudiant l’impact de cette loi sur 40 ans, Roberto Mezzina[1] présente quelques preuves de l’impact de la loi sur 40 ans, affirmant que « les contraintes mécaniques ont été abolies dans les soins de santé et les services sociaux, y compris dans les maisons de retraite, les centres d’hébergement et hôpitaux généraux ».
Il souligne qu’après la promulgation de la loi en 1978, les traitements involontaires ont « chuté de façon spectaculaire » et « ont conservé le taux le plus bas d’Europe (17/100 000 en 2015) et la durée la plus courte (10 jours) ».
Les centres d’aide entre pairs
Il existe un large éventail d’initiatives menées par des personnes souffrant de troubles mentaux ou de handicaps psychosociaux. Ces initiatives comprennent des organisations d’entraide et des groupes de développement communautaire, des organisations d’usagers de services soutenues par l’État, des groupes d’activistes indépendants, des « groupes de travail de pairs » dans les hôpitaux et d’autres services de santé mentale.
Ces groupes sont présents dans les pays à revenus faibles, moyens et élevés.
Les organisations ou groupes représentant les usagers de services, les anciens usagers de services et d’autres personnes souffrant de handicaps psychosociaux sont enclins à préconiser des mesures plus fortes pour réduire et mettre fin à la coercition et à viser un changement plus ambitieux dans la pratique, par rapport aux cliniciens.
Souvent, ces organisations insistent sur la nécessité d’éliminer l’isolement et la contention[2].
[1] Ancien directeur du département santé mentale du centre collaborateur de l’OMS pour la recherche et la formation, Azienda Sanitaria Universitaria Integrata Trieste, Italie.
[2] Voir, par exemple, Réseau mondial des usagers et survivants de la psychiatrie, Human Rights Position Paper of the World Network of Users and Survivors of Psychiatry (Position sur les droits de l’homme du Réseau mondial des usagers et survivants de la psychiatrie) < http://www.wnusp.net/index.php/human-rights-position-paper-of -the-world-network-of-users-and-survivors-of-psychiatry.html > ; Balance Aotearoa, ‘Disability Action Plan’ .