Que se passe-t-il au Centre Hospitalier du Rouvray ?
La Commission des Citoyens pour les Droits de l’Homme (CCDH), association dénonçant les violations des droits de l’homme commises en psychiatrie, et plus particulièrement certains actes de maltraitance, traitements inhumains et dégradants, manifestera devant le Centre Hospitalier du Rouvray à Sotteville-lès-Rouen le samedi 18 janvier 2020 de 15h45 à 16h30.
Les abus ne cessant pas et la direction de l’hôpital refusant de répondre à la demande de la CCDH, les manifestants se rendront devant l’établissement.
Depuis la loi du 26 janvier 2016, tous les établissements psychiatriques sont obligés de tenir un registre de contention et d’isolement et d’émettre un rapport annuel pour rendre compte de leurs pratiques aux autorités.
L’article L.3222-5-1 du Code de santé publique dispose que l’isolement et la contention sont des pratiques devant être utilisées en dernier recours et énonce clairement un objectif d’encadrement et de réduction de ces pratiques, tant au niveau national qu’au niveau européen (recommandation 2004-10 du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe et rapport du Contrôleur général des lieux de privation de libertés « Isolement et contention dans les établissements de santé mentale »). La Ministre des solidarités et de la santé, Madame Agnès Buzin, a également lancé un plan national de réduction du recours des soins sans consentement et à la contention.
Le 6 décembre 2018, la CCDH a demandé la communication du registre de contention et d’isolement ainsi que le rapport annuel relatif à ces pratiques auprès de la direction du Centre Hospitalier du Rouvray.
N’ayant pas répondu à cette demande, la CCDH a dû saisir la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), puis le Tribunal administratif de Rouen.
Ce que ne comprend pas la CCDH est le silence gardé par l’administration. Est-ce qu’ils auraient des choses à cacher ? Pourquoi la direction ne respecte-t-elle pas l’avis rendu par la CADA ordonnant la communication de ces documents ?
La CCDH rappelle que, selon les recommandations de la Haute Autorité de santé, l’isolement est limité à 12 heures, la contention est limitée à 6 heures, ces mesures devant toujours rester exceptionnelles ; de plus l’article L.3211-3 du Code de santé publique dispose que, lorsqu’une personne est internée sous contrainte, « les restrictions à l’exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en œuvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée. »
De plus, cet établissement a fait l’objet d’une visite de contrôle en octobre 2019 par la Contrôleure Générale des Lieux de Privation de Liberté (CGLPL), Adeline Hazan et qui, au vu de la situation très inquiétante, a publié des recommandations en urgence au Journal Officiel.
Au sein des 23 unités contrôlées du Centre Hospitalier du Rouvray, 41 chambres d’isolement y sont installées et de nombreux abus ont été constatés concernant l’utilisation de celles-ci.
En effet, plusieurs mesures d’isolement sont contraires à la législation, au respect des droits fondamentaux et la dignité humaine.
Les chambres d’isolement sont souvent indignes ; elles sont équipées de seaux hygiéniques et ce, parfois sans couvercle, cela obligeant les patients à respirer leurs excréments. Certaines chambres sont imprégnées d’une odeur d’urine et elles n’ont pour la plupart pas de bouton d’appel. Des patients sont laissés nus dans la chambre d’isolement pour soi-disant éviter le risque suicidaire.
Certains patients en soins libres sont placés à l’isolement pour des raisons punitives ou bien pour une volonté de contraindre à la thérapie.
Il a également été constaté que des enfants sont hospitalisés avec des adultes et parfois enfermés en chambre d’isolement.
En outre, la liberté d’aller et venir de l’ensemble des patients fait l’objet de restrictions. En effet, très peu de patients sont autorisés à circuler librement dans le parc de l’établissement et l’autorisation de circuler n’est donnée aux personnes en soins libres que si les personnes en soins sans consentement sont confinées derrière une porte qui scinde l’unité en deux parties.
La Controleure précise que : « Le droit de libre circulation des patients en soins libres est soumis à la disponibilité des soignants pour ouvrir la porte de l’unité. Ils sont de facto contraints d’être hospitalisés sans même pouvoir accéder aux dispositifs mis en place hors des unités (…) Concernant les patients en soins sans consentement, il convient de rappeler que nulle disposition dans les textes n’indique que ceux-ci doivent être privés de leurs droits ipso facto, y compris celui d’aller et venir : toute restriction doit être individuelle, décidée en fonction de son état clinique, après évaluation médicale. »
En outre, il a été observé que : « (…) de janvier à octobre 2019, soixante-dix-huit mesures de soins libres ont été transformées au cours du séjour en mesures de soins sans consentement (…) »
Par ailleurs, certains patients se voient imposer le port du pyjama, ce à quoi s’ajoute parfois la prescription d’une sédation.
Au vu de tels faits graves et manquements à la loi, la CCDH a récemment alerté les autorités concernées (Maire, Préfet, Députés, Sénateurs, Agence Régionale de Santé, etc.), afin que cet établissement améliore rapidement ses pratiques et qu’il respecte la dignité et les droits fondamentaux des patients.
Contact presse :
Tel : 01.40.01.09.70
E-mail : info@ccdh.fr