Hospitalisation sous contrainte à la demande d’un tiers
A 18 ans, alors que mes relations avec ma mère étaient très tendues, je suis parti vivre chez ma grand-mère. Un jour j’ai appelé ma mère au téléphone, mais comme elle a refusé de me parler, je l’ai insultée. Ce n’était « pas bien », ce n’est pas la bonne manière d’arranger les choses mais je ne m’attendais pas à ce qui allait se passer ensuite.
Je mangeais avec ma grand-mère quand tout à coup on a frappé à la porte. Ma grand-mère est allée ouvrir et m’appelé. Quand je suis descendu, j’ai vu un médecin et une ambulance. Comme j’ai refusé de me faire ausculter, le médecin m’a menacé de faire appel à la gendarmerie si je ne coopérais pas. J’ai proposé de les attendre mais ma grand-mère, pensant bien faire, m’a dit d’accepter.
Le médecin, sans aucun dialogue, a juste pris ma tension, et m’a dit qu’il fallait faire des examens complémentaires aux urgences psychiatriques. J’ai d’abord refusé mais il m’a dit que je ne resterais que le temps des examens et que je pourrais rentrer après.
Je suis resté un mois et demi à l’hôpital. Je n’ai eu aucune information concernant la raison de mon hospitalisation, aucune information sur les traitements qu’on me demandait de prendre. J’ai eu la chance de ne pas subir d’autres abus. D’autres patients n’avaient pas la même chance. J’ai entendu les hurlements de personnes enfermées en isolement pendant des journées entières. J’ai vu un matin qu’une patiente avec été attachée toute une nuit pour avoir tenté de se suicider. Je pense que si je n’avais pas accepté de faire tout ce qu’on me disait j’aurais pu subir ce type d’abus.
Aucune activité n’a jamais été proposée en dehors de la télévision et les journées pouvaient être très longues. L’ambiance du lieu était très étrange et peut être à cause des médicaments, je n’ai que des souvenirs assez flous de l’hospitalisation en général… Je ne me souviens pas où étaient les douches et les toilettes.
Je ne sais toujours pas aujourd’hui quel échange ma mère a eu avec le médecin avant la décision de mon hospitalisation. Cependant l’hospitalisation sous contrainte est censée être réservée aux personnes mettant en danger autrui et eux-mêmes. Je ne pense pas avoir déjà fait partie de cette catégorie. Après l’hospitalisation, je me suis réveillé souvent la nuit en pleurs, j’avais peur qu’à tout moment on puisse m’obliger d’y retourner.
Ce qui est horrible aussi c’est l’image que le personnel hospitalier a de vous. J’avais l’impression qu’on me parlait comme à quelqu’un de dangereux, comme si j’avais commis quelque chose de préjudiciable.
J’espère que mon témoignage pourra contribuer à faire avancer le système psychiatrique qui, je trouve, vous rend plus malade qu’il ne vous soigne.