Témoignage – Hôpital psychiatrique Simone Veil, Eaubonne
Il y a quelques années, j’ai été hospitalisée à l’hôpital Simone Veil, à Eaubonne, dans différents services psychiatriques. Ainsi, j’ai vécu et été témoin de nombreux abus. Je vais donc vous lister certaines des choses qui m’ont interpellée.
Tout d’abord, dans le service adolescent (UPAJA) le recours à la chambre d’isolement est systématisé. Une patiente, hospitalisée depuis de longues années restait souvent plusieurs jours, voire semaines, dans cette chambre. Nous l’entendions crier, taper dans les murs… Pourquoi ? Comme punition face à ses troubles du comportement qui pouvaient, en effet, impacter le personnel et les autres patients. Mais n’est-ce pas le rôle des professionnels de santé de savoir que les patients dans ces services ne sont pas des plus adaptés socialement ? De plus, dans la même thématique : le recours au pyjama d’hôpital, une humiliation pour le patient. En effet, si un.e patient.e le portait, nous savions qu’elle avait dérogé à une règle. Finalement, l’individu se sentait humilié, déshumanisé. Or, l’hôpital devrait être un lieu d’asile, lieu où une personne en danger trouve refuge. Non pas un lieu où nous ressortons plus traumatisés qu’initialement.
De plus, une patiente souffrant d’anorexie mentale a été forcée à prendre le traitement d’un autre patient, qui devait bien faire 3 à 4 fois son poids, avec une pathologie toute autre. Celle-ci s’est donc retrouvée avec du valium en guise de traitement. Elle avait vu que ce n’était pas son traitement, mais l’infirmière a affirmé qu’elle faisait un caprice pour ne pas le prendre… Elle s’est retrouvée dans un état léthargique profond.
D’autre part, j’ai été victime de harcèlement sexuel (au service d’Unité Transitionnelle, UT) dans l’enceinte de l’hôpital. Quand j’ai enfin réussi à en parler, je dirais 1 ou 2 semaines après le début de tout ça, des infirmières m’ont dit « mais non, tu avais juste des attentes trop élevées envers lui, donc tu es déçue maintenant ». Evidemment, (sarcasme) parler à un garçon veut obligatoirement dire que je désire qu’il me fasse du chantage pour toucher des parties de mon corps, ou qu’il m’invite dans sa chambre.
Mais aussi, un jour, j’ai appuyé sur la sonnette d’urgence/d’alarme dans ma chambre, après m’être scarifiée. On est venu me voir, et j’ai eu le droit à ces paroles : « Bravo, applaudissement, vous auriez dû faire des petits dessins sur vos cuisses aussi !! ».
Mais aussi, j’ai été témoin de comportements extrêmement déplacés de la part d’une infirmière. Un patient lui disait être asexuel (c’est-à-dire ne pas ressentir, ou que très peu, de désir sexuel), celui-ci échangeait des regards avec une patiente. Ils se plaisaient bien, mais ils ne faisaient rien, si ce n’est se dire bonjour et se sourire. Suite à cela, cette infirmière touche la poitrine de la personne asexuelle, et lui dit « tu verras quand ***** te mettra des doigts tu vas vite changer d’avis ». Inadmissible. Cette infirmière travaille toujours dans le service, même si les faits ont été rapportés au personnel soignant par la victime.
Dans le service adulte (GREEN), une femme âgée qui avait perdu son mari, dont je ne connais pas les autres problématiques, faisait une crise d’angoisse au moment des traitements. Elle avait tendance à beaucoup pleurer. Une soignante lui a donc dit de se taire. Ainsi, une patiente (mineure, hospitalisée avec les adultes) a dû l’aider à gérer cette importante crise, à défaut des professionnels qui accentuaient ses angoisses.
Enfin, dans le service des urgences psychiatriques (ZARIFIAN), j’ai été victime de moqueries de la part de deux infirmières. J’avais une blessure d’automutilation importante sur mon bras, qui nécessitait des soins quotidiens. Je les entendais glousser dans mon dos, relevant le caractère insensé de mon acte.
Au moment des repas, j’avais un couteau bout rond, avec celui-ci je me suis faite du mal. Quand l’infirmière a vu cela elle m’a dit : « Tu n’es pas chez les ados, on n’a pas le temps pour ces gamineries ».
Les personnes qui arrivent dans de tels endroits ont sincèrement besoin d’aide, non pas que les soignants projettent leurs propres difficultés sur eux en ajoutant à leur liste des traumatismes.